30 January 2024
Les horloges optiques ont démontré des incertitudes relatives de fréquence au niveau de 10-18 (la 18e décimale !) en fréquence fractionnelle, après des temps d’intégration de l’ordre de 1 000 secondes. Cela en fait des candidats de choix pour des applications en navigation, géodésie et physique fondamentale. En particulier, la géodésie chronométrique, c’est-à-dire la détermination des différences de géopotentiel entre des endroits éloignés en mesurant la différence de fréquence des horloges, devrait contribuer de manière significative aux études en géophysique, étude des variations du niveau de la mer, détermination du géoïde, et sujets connexes.
En effet, selon la théorie de la relativité générale d’Einstein, une horloge sera décalée vers le rouge de 10-18 lorsqu’on élève sa hauteur d’environ 1 cm au-dessus du géoïde. Les horloges optiques modernes peuvent être utilisées pour la géodésie centimétrique, ce qui est compétitif et complémentaire aux meilleures techniques de géodésie spatiale disponibles (CHAMP, GRACE, GRACE Follow-On, ...).
Pour mettre en œuvre la géodésie chronométrique, on a besoin de deux ingrédients : des horloges transportables de haute performance, qui peuvent être facilement déployées sur le terrain à des endroits où une mesure de géopotentiel est intéressante (par exemple, le projet ROYMAGE coordonné au SYRTE), et des liaisons de moyenne distance qui sont facilement déployées et permettent de comparer l’horloge sur le terrain à une horloge de référence distante. Actuellement, seules les méthodes optiques utilisant la phase porteuse ou des impulsions femtosecondes permettent de comparer les horloges optiques sans dégrader leurs performances. De telles méthodes ont été mises en œuvre dans des liaisons par fibre optique et plus récemment à travers l’espace libre, cette dernière étant particulièrement utile pour la géodésie chronométrique.
Les liaisons en espace libre sur des distances > 100 km nécessitent un relais aéroporté. Une équipe de chercheurs du SYRTE et du CNES a récemment démontré une liaison optique via un rétro-réflecteur aérien (un ballon captif à 300 m d’altitude) atteignant une stabilité de 8x10-19 après une moyenne de 16 s, le meilleur résultat à ce jour sur de telles liaisons. Le terminal au sol est facilement transportable : il est déployé et verrouillé en phase, entièrement opérationnel, en moins de 30 min. Cette expérience à ligne de base nulle est une première étape vers des comparaisons d’horloges véritablement point à point, d’abord sur de courtes distances via un relais à basse altitude, et finalement en utilisant une plateforme stratosphérique à 20 km d’altitude permettant des comparaisons d’horloges sur des lignes de base de plusieurs centaines de km.
Stabilité de fréquence relative avec et sans compensation de bruit de phase, pour le lien au ballon et à une cible au sol (coin cube identique fixé au sol à 300 m du terminal).
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Sur la géodésie chronométrique
Contact chercheur : Peter.wolf_at_obspm.fr